3 mai 2007
Le jour où je suis devenue Royaliste:
Je m’étais promise de revenir sur le blog en mai 2007 sur un sujet jamais abordé lors de mes années passées auprès de mon frère.
Pardonnez-moi cette indécence, mais aujourd’hui, je parlerai de politique.
Nicolas Sarkozy ?
Il y a longtemps que j’admirais dans l’homme le sens de l’effort, l’acharnement au travail, la maîtrise des dossiers, et une conviction toute américaine qu’un « French Dream » est possible.
Mais je ne pouvais, en amoureuse de la civilisation des Lumières, choisir de voter pour Mr Sarkozy, dont la vision de la France est celle d’une “autre” lutte des classes, d’une catégorisation manichéenne des citoyens entre méritants et parasites, entre individualistes et rêveurs, entre monde ouvrier et chômeurs de ZUP. Je ne pouvais pas ignorer le souffle autoritariste, dangereux pour la démocratie, qui le fait déclarer dans l’entretien au Nouvel Observateur, il y a 4 semaines, qu’il ne sera pas un “président qui délègue”. Je ne pouvais soutenir les accents eugénistes de ses propos aventureux sur les origines génétiques de la délinquance.
Les propositions de Nicolas Sarkozy représentaient, certainement malgré lui, le piétinement des valeurs de la patrie de Montesquieu et Diderot et ne pouvaient en faire l’homme d’Etat, suffisamment digne à mes yeux de préserver le seul patrimoine qui vaille la peine d’être défendu : l’idée selon laquelle la liberté de penser et d’agir a pour fondement le combat contre l’ignorance et la peur.
Mais François Bayrou :
J’avais une autre exigence, corollaire de la première : voir sortir la France d’un cataclysme économique annoncé, de ces manuels d’économie ou elle figure systématiquement au bas de l’échelle du G-7 en matière de compétitivité, la faire cesser d’être une économie qui ne crée pas, ou peu de richesses, mais tente vainement de partager avec toujours plus de difficulté le gâteau d’une croissance qui s’amenuise.
Je voulais que la France montre qu’elle pouvait devenir une véritable économie de marché, assumée, capable d’attirer les investisseurs en quête de souplesse et de dynamisme, d’inventivité et de ressort face a la Chine et a l’Inde.
J’avais gardé de mes années 80 à Madagascar l’expérience catastrophique du dirigisme étatique: l’histoire d’un puissant mécanisme de destruction de valeur ajoutée, et donc, créateur de pauvreté. Au regard de la mortalité infantile, de la misère et des générations sacrifiées: ce fut un choix de société pour le moins discutable.
Dans mon activité professionnelle quotidienne, à la SFI comme au secteur privé de la BAD, chaque business plan approuvé, chaque ligne de crédit autorise est un entrepreneur qui embauche, et fait vivre une famille. Une de plus, protégée du besoin. Une de moins exposée a l’indigence. Mon raccourci préfère : toute politique qui protège l’entrepreneur est une politique qui lutte contre la pauvreté. L’université de Chicago s’est chargée de me démontrer la justesse de cette thèse, la seule qui, pour reprendre les termes du Pr Kevin Murphy, ait résistée au test du temps, aux outrages de l’Histoire.
Au premier tour, je n’avais qu’un choix clair, celui de Mr Bayrou. Et tant pis si ce centre ne pouvait designer sa gauche et sa droite. « Il faut choisir son camp » me disait-on. Il était tout choisi : celui de la démocratie sociale, Je voulais d’une France républicaine, et compétitive, soutenue, et non mise a genoux, par un système de solidarité sociale préservé dans ses fondements mais assaini dans ses applications, plus efficace et par conséquent plus juste. Le camp de Mme Merkel, de Mr Strauss-Kahn, de Mr Cavada.
Puis, un jour de 2 Mai 2007, Ségolène Royal.
Ce choix de bord m’avait toujours été pris en porte-à-faux : le « vote Ségolène » était le vote naturel de mes parents, médecins et professionnels de santé publique, qui n’avaientt « pas de tolérance pour les intolérants ». Un vote de droite, fût-il du centre, était un vote suspect.
Plus suspect encore, une femme devait voter pour consacrer l’égalité final. Voter pour une femme, cette fois-ci, cette fois-ci seulement peut-être, mais voter. Pour le principe d’équité. Pour célébrer la victoire de la féminité assumée. Voter pour toutes celles qui se lanceront plus tard dans la course. Pour toutes celles qui y sont déjà. Mais, comme beaucoup de femmes autour de moi, n’ayant pas vu de plus de preuves tangibles de courage, de pugnacité, de dimension politique, je me retranchai derrière un « je ne suis pas sûre » classique, apeuré.
Et puis, ce 2 mai, il y eu ce débat. Cette femme contre le favori. Il y eut son courage de regarder son adversaire dans les yeux, de soutenir son regard, de le forcer à se battre. Il y eut le courage de braver le procès d’incompétence, pour répondre à chaque injonction d’ordre technique. Il y eut la force de cette femme en jupe qui, loin du complexe de féminité d’une certaine femme ministre, n’a endossé que des pantalons dans la peur de se faire traiter, justement, de femme, qui dit « je connais votre technique, Mr Sarkozy, à chaque fois que vous êtes en difficulté, vous vous posez en victime ».
Il y eut cette réponse à la question de savoir ce qu’elle pensait de son adversaire : « je ne m’intéresse pas aux personnes mais aux idées » rappelant à celles et ceux qui l’auraient oublié, que la France est d’abord et avant tout, le berceau des idées. Et qui si, par malheur, elle s’attardait sur les personnes, leur origine, leur race, leur religion, leur classe sociale, elle en deviendrait le tombeau.
Mais enfin, contre le procès d’incompétence lance par ses adversaires, contre les attaques de son propre camp, contre les insultes de son propre genre, il y eut, enfin et surtout, cette femme qui dit à une France qui a peur, surmontez-la !
Ce jour-là, pour l’espoir d’un monde plus juste, je suis devenue Royal-iste.
Posted by Randiana R.
Je l'avais trouve un peu aggressive, SR, mais c'est vrai que l'aplomb y etait. Reste a savoir si ca sera suffisant.....on le saura bientot.
ReplyDeleteBonjour Sarah,
ReplyDeleteOui, resultat imminent...ca sent un peu le roussi pour SR mais bon...
Alors, pas trop déçu par la victoire du défenseur du femme en Burqa et de l'orphelin, ami de l'Afrique élu avec les électeurs du FN et j'en passe ... ?
ReplyDeleteEn fait, je suis assez curieux de voir la tournure que vont prendre les choses..qu'est-on pret a sacrifier pour esperer produire un revirement economique en France....
ReplyDeleteA mon humble avis, tu as mis le doigt sur « la question » on ne jure plus que par la croissance économique :( et après ?
ReplyDeleteA travers tes écrits Randiana, tu me donnes envie de te connaître SRG
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